New Order

Nuits sonores : le concert événement

CULTURE - Festival autoproclamé sans tête d’affiche, les Nuits sonores trichent un peu chaque année via des “concerts spéciaux” particulièrement relevés. En vedette de l’édition 2012, New Order, premier groupe à avoir réconcilié fans d’indie-rock et de danse électronique.

Ironie de l’histoire (du rock), on doit la naissance de l’un des plus grands groupes des années 1980 à un acte de décès. Celui de Ian Curtis, en 1980, chanteur et âme tourmentée de Joy Division, dont New Order est l’émanation. Si Curtis, inventeur avec ses collègues d’une forme de rock froide et terrifiante comme on n’en avait jamais entendu – et comme on n’en entendra sans doute plus jamais – ne s’était pas pendu à un séchoir à linge dans sa cuisine un jour de déprime, sans doute New Order n’aurait-il jamais existé. Pas question en effet pour les trois membres restants de Joy Division – Bernard “Barney” Sumner, Peter Hook et Stephen Morris – de continuer sous ce nom sans Curtis (ni même aucun autre des membres du groupe, avaient-ils un jour convenu). Convoquant la femme de Morris, Gillian Gilbert, New Order naîtrait donc des cendres de Joy Division.

Blue Monday

La musique de New Order est partie pour suivre la voie sombre tracée par Joy Division, auquel le groupe emprunte l’un de ses titres mythiques, le sémillant Ceremony. Jusqu’au jour où se produit un autre incident, alors même que le groupe est de plus en plus influencé par la musique électronique : après avoir fabriqué lui-même un séquenceur, Bernard Sumner fait une erreur de branchement en studio, en le reliant à la prise dévolue à la sortie batterie. Le son qui en résulte fera le reste.

En même temps que le titre Everything’s Gone Green, naît le style New Order, ce synthé saccadé reconnaissable entre mille, convoquant une rythmique qui bégaierait elle-même les mélodies. Les tubes commencent à pleuvoir et opèrent le premier véritable mariage entre rock et électro dansante.

En plein thatchérisme rampant, la jeunesse anglaise a enfin l’occasion de relever la tête et recouvre le goût d’une fête dont Blue Monday sera l’hymne. Sur le modèle des clubs qui fleurissent aux États-Unis, le groupe fonde alors à Manchester, sa ville natale, le mythique Hacienda. Probablement l’un des clubs les plus branchés et les plus innovants de l’histoire de la musique (Laurent Garnier en fut le DJ résident bien avant la gloire), où germa également la future génération “Madchester” (les Stone Roses, qui seront à Fourvière en juin, les Happy Mondays...) élevée à cette musique qui ne sait pas choisir entre la pop, le rock, la danse et les drogues (à l’Hacienda, on trouvait vraiment de tout).

Here to stay

De plus en plus pop, l’esthétique New Order culmine avec Technique, en 1989, qui marque un peu son premier chant du cygne. Même si le groupe sort Republic en 1993, le grunge est alors au pouvoir, le cœur n’y est plus et chacun y va de ses projets parallèles : Sumner s’acoquine avec Johnny Marr, guitariste des Smiths, pour former le duo électro-rock Electronic, quand Peter Hook, dont on ne dira jamais assez à quel point la basse au son aquatique a contribué à définir l’identité musicale de New Order, décalque les hits de ce dernier avec Monaco.

En 2001, en plein retour du rock (mort trois fois minimum en dix ans), c’est la reformation et le retour en force : un vrai disque de rock, Get Ready, qui met le monde de la musique KO en quelques tubes.

New Order est resté le groupe important qu’il était, avec cette capacité à pondre un tube par jour ou presque. Le titre du single Here To Stay, composé dans la foulée pour la BO de 24 Hour Party People, le film qui raconte les grandes heures du label Factory et de l’Hacienda, est en cela assez symbolique d’un groupe qui ne s’est jamais démodé. Mais qui, contrairement à sa promesse de jeunesse, se produit désormais sans son bassiste, un Peter Hook qui n’est pas très content et dont la basse risque de manquer.

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New Order, dimanche 20 mai, à 21h, à la Sucrière (Confluent).

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