Alzraa, un escroc millionnaire dans l'ombre de Neyret

Condamné à un an de prison ferme en juin dernier, Stéphane Alzraa ne semblait pas être recherché par la police. Son casier judiciaire était vide, malgré sa condamnation. Depuis 4 mois, l'escroc brassait des millions grâce à la taxe carbone et a été aperçu à Lyon et à Cannes au volant de grosses cylindrées. Il prêtait ses bolides au commissaire Neyret et lui offrait des voyages. L'IGS, la police des polices, enquête sur les relations entre les deux hommes.

Dans sa chute, Michel Neyret, le "super-flic" lyonnais, détenu à la prison de la Santé depuis lundi soir, a entraîné avec lui quatre fonctionnaires de police et trois Lyonnais ayant des liens avec le grand banditisme. Stéphane Alzraa, un truand présumé de 31 ans en détention provisoire pour corruption et trafic d'influence, Gilles Bénichou, son cousin germain, mis en examen pour corruption et trafic d'influence sur personne dépositaire de l'autorité publique et Michel Zaragoza, 49 ans, un ancien braqueur reconverti dans le négoce automobile poursuivi pour trafic de stupéfiants, blanchiment et association de malfaiteurs. Qualifiés "d'escrocs de haut vol" par des sources policières, ces trois Lyonnais qui se connaissent, ont tous été en lien avec Michel Neyret. Stéphane Alzraa a avoué, devant les enquêteurs, que l'ex n°2 de la PJ de Lyon était un "ami".

Un casier vierge malgré une condamnation

Mis en examen pour corruption et trafic d'influence, Stéphane Alzraa est écroué à la maison d'arrêt de Fresnes. Il a été interpellé dans sa luxueuse villa cannoise, jeudi 29 septembre. Les enquêteurs de l'IGS s'interrogent sur le fait qu'il avait un casier judiciaire vierge malgré une condamnation à un an de prison ferme pour escroquerie et fraude fiscale par le tribunal de grande instance de Lyon, en juin dernier. Absent lors de l'audience, Stéphane Alzraa ne s'est jamais présenté à la justice. Michel Neyret aurait-il favorisé son "ami" ? Etait-il protégé par le commissaire ? Il semblerait que ce soit l'un des volets sur lequel travaille l'inspection générale des services (IGS) aujourd'hui. D'après Le Point, Alzraa aurait reconnu devant le juge avoir demandé à Michel Neyret d'intervenir en sa faveur. A Lyon, Neyret et Alzraa ont été aperçus plusieurs fois ensemble dans des bars et des discothèques de la ville. Le truand, qui louait une maison 12 000 euros par mois, à la Roquette-sur-Siagne, dans l'arrière-pays cannois, l'aurait invité à plusieurs reprises dans sa villa et lui aurait prêté de grosses cylindrées. Il lui aurait également offert deux voyages à Marrakech avec sa femme. Quant à Gilles Bénichou, il aurait remis une montre Cartier d'une valeur de 24 000 euros à Michel Neyret.

"Il se prenait 20% sans rien faire"

A la tête d'une petite fortune, Stéphane Alzraa avait monté une escroquerie fort lucrative à la TVA via le marché du dioxyde de carbone. D'après nos informations, il achetait des quotas de CO2 hors taxes à des entreprises européennes et les revendait en France, avec 19,6% de TVA. L'embrouille consistait à ne pas reverser la TVA au fisc et à fermer ses comptes français au plus vite. Mais pour entrer dans ce genre de marché, les mises de départ sont très élevées. Des soupçons pèsent sur Stéphane Alzraa et le milieu du grand banditisme lyonnais. "Stéphane a réussi à brasser plusieurs millions d'euros. En une journée, il se prenait 20% sans rien faire. Ça a été l'un des premiers en France à mettre en place ce genre d'escroquerie", précise l'un de ses proches. Depuis le 12 septembre, un vaste procès a d'ailleurs lieu au tribunal correctionnel de Paris dans le cadre d'une escroquerie en bande organisée sur le marché du CO2. C'est le premier procès de cette envergure en France. 17 prévenus comparaissent, dont l'un d'entre eux a été interpellé sur le yacht de Stéphane Alzraa. Son nom est d'ailleurs cité dans le dossier. Du côté du Trésor public français, les pertes, concernant l'ensemble des escroqueries, sont lourdes : 1,5 milliard d'euros se sont envolés. Sur le plan européen, Interpol évalue la perte à 5 milliards d'euros.

Un manque de discrétion

Originaire d'Irigny (Rhône), Stéphane Alzraa ne travaillait pas ou très peu. Il montait des sociétés puis les fermait. Subitement, ses copains le voient mener grand train. "Personne ne savait vraiment ce qu'il faisait. Mais il gagnait beaucoup d'argent et le montrait", avoue un de ses proches. "D'ailleurs, il était très généreux et n'hésitait pas à faire de beaux cadeaux à ses potes." Sur la Presqu'île, tout le monde le connaissait. Son péché mignon ? Rouler en ville au volant de voitures de luxe exceptionnelles : Bentley, Rolls Royce, Aston Martin... "A Lyon, il n'y a pas 50 types susceptibles de se payer ce genre de bolides. On savait tout de suite que c'était lui", explique un commerçant. Très peu discret, Stéphane Alzraa ne se cachait pas. "Je savais que certains escrocs juifs qui avaient bénéficié de la taxe carbone allaient se réfugier en Israël où les accords d'extradition n'existent pas pour ce genre d'infraction, je ne comprenais pas pourquoi lui restait en France. Aujourd'hui, j'ai peut-être compris..." précise notre interlocuteur.

D'après nos informations, l'avocat de Stéphane Alzraa aurait fait appel du jugement du TGI de Lyon pour fraude fiscale. Il a également dénoncé, jeudi 6 octobre, le maintien en détention provisoire de son client, décidé, selon lui, pour apaiser "la pression médiatique".

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