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Comment Lyon est devenu la capitale du bridge

Plus de 3 500 joueurs des quatre coins de la planète sont attendus à Lyon du 12 au 26 août, pour les 43es championnats du monde de bridge. Les retombées directes générées par l’événement sont estimées entre 5 et 7 millions d’euros.

Article paru dans le mensuel N°768 de Lyon Capitale actuellement en vente.

Qu’ont en commun James Bond, Bill Gates, Martina Navratilova, le groupe de rock Radiohead et l’office de tourisme de Lyon ? A priori, rien. Pourtant, tous sont des inconditionnels du bridge. Si la passion des quatre premiers pour ce “sport cé-rébral” – admis comme tel par le mi-nistère des Sports et dont le CIO a re-connu la fédération internationale (1) – n’est pas nouvelle, en revanche, pour les promoteurs de la destination lyonnaise, l’engouement est aussi soudain que récent. “Ce qui manque à Lyon, ce sont les grands événements au mois d’août. Alors, quand on nous a proposé des championnats du monde sur quatorze jours en plein mois d’août, avec près de 4 000 participants, c’est certain qu’on s’est intéressé de plus près au bridge”, explique Valérie Ducaud, directrice du bureau des congrès de Lyon sous la marque Only Lyon. C’est ici, place Bellecour, que la stratégie pour candidater aux congrès internationaux est élaborée et déployée. Pour les championnats du monde de bridge, qui ont lieu tous les quatre ans, dans le même format que le mondial de football – avec des éliminatoires par zone, des pays qualifiés pour les épreuves, des poules et un tableau final – la charte était simple : un lieu avec des connexions internationales, un centre de congrès suffisamment grand pour accueillir plus de 3 500 joueurs, un parc hôtelier conséquent et de bonne facture (3 à 4 étoiles) et de belles op- portunités de tourisme.

Lobbying

Deux pays avaient déposé leur candidature : la France et l’Australie. Pour la France, Lyon était la seule ville retenue par la Fédération française de bridge. L’Australie, plus réputée pour son rugby que pour son bridge, avait quant à elle tout misé sur la Gold Coast, une conurbation touristique du Queensland, en bordure de Pacifique. Si le poids des deux fédérations (100 000 licenciés en France contre 37 000 en Australie) a incontestablement pesé dans le choix final, c’est la qualité du dossier lyonnais qui a visiblement fait pencher la balance. Tout s’est joué en sept mois. La méca- nique (bien huilée) du lobbying touristique lyonnais a été amorcée en mars 2013, avec la visite du bureau de la Fédération internationale de bridge, dont le siège est à Lausanne, à deux entames de Lyon – “pour voir si l’offre présentée dans le dossier correspondait à la réalité”. Au mois de juillet suivant, le bureau des congrès a envoyé sa candidature officielle. “Le coût et l’accessibilité sont aujourd’hui les deux critères principaux pour décrocher un gros congrès”, explique Valérie Ducaud. Le coût : pour attirer les événements à Lyon en août, mois creux de l’année, des tarifs “été” sont un avantage concurrentiel par rapport à des destinations n’ayant pas la même saisonnalité que Lyon. La location du centre des congrès a ainsi été soldée à -35 % : 489 500 euros pour deux semaines, soit 35 000 au lieu de 47 000 par jour. Quant à l’accessibilité, l’offre lyonnaise “dispose d’un accès facile depuis divers endroits à travers le monde. Une connexion de Dubaï facilite l’accès de l’Asie et les visiteurs d’Amérique du Nord et du Sud peuvent arriver en avion par Paris-Roissy ou Genève pour un trajet de train relativement court”, a souligné la Fédération internationale de bridge lors de sa visite d’inspection.

Package global

Baiser à la reine sur le jeu de cartes, Only Lyon a débloqué son dispositif “Lyon Welcome Attitude”, “unique en Europe”, dont le but est de proposer aux organisateurs de grands événements internationaux (les “dossiers stratégiques”, dans le jargon lyonnais) une offre de services “packagée” à travers un accueil personnalisé aux couleurs des championnats du monde : accès spécifique dans les transports en commun, stand d’arrivée à l’aéroport et dans les gares, signalétique et pavoisement en ville, partenariats avec les hôtels, les bars et les restaurants, partenariat pour des ventes discount et en détaxe avec le Printemps et les Galeries Lafayette, édition d’un guide collector proposant un condensé des incontournables de Lyon pour permettre aux visiteurs de découvrir Lyon et la métropole durant leur séjour. “Sur de gros flux de participants, Only Lyon organise tout le fléchage, l’accompagnement depuis les gares, l’aéroport, etc., pour aider les congressistes à se diriger dans la ville”, résume l’office de tourisme. “Le travail préparatoire de la fédération française en amont ainsi que la qualité de la présentation du dossier de Lyon devant le comité exécutif ont conduit les Australiens à retirer leur candidature”, relate Valérie Ducaud. Les collectivités ont dès lors pris le relais. La Métropole, la Ville et la Région ont ainsi subventionné les championnats du monde de bridge à hauteur de 250 000 euros (sur un total de 1,4 million d’euros) (2). “Quelques dizaines de mil- liers d’euros pour un impact économique estimé entre 5 et 7 millions d’euros, aux- quels s’ajoutent 45 000 euros de taxe de séjour (3), c’est sacrément rentable”, justifie un cadre de la métropole. Du point de vue de l’affluence, les championnats du monde de bridge, c’est un peu moins d’un quart des dix congrès dits “majeurs” de Lyon en 2017. Pour l’obtenir, Lyon a donc sorti le portefeuille... et joué son atout cœur.

1. Le Comité international olympique (CIO) reconnaît depuis 1999 la World Bridge Federation (WBF) comme une fédération sportive à part entière. Le bridge n’a malgré tout pas été retenu par le comité d’organisation dans la liste des sports (comme le surf, le skateboard, le baseball, l’escalade et le karaté) qui feront leur entrée aux JO de Tokyo, en 2020.
2. 150 000 € pour la métropole, 50 000 € pour la Ville de Lyon et 50 000 € pour la région Auvergne- Rhône-Alpes.
3. Sur la base d’une dépense journalière de 180 € par personne sur quatorze jours.

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