Laurent Wauquiez, la passion santons

Il n’y aura pas de crèche à l’hôtel de région cette année. Début octobre, le Conseil d’État a déclaré sa mise en place illégale. Une décision que Laurent Wauquiez semble bien décidé à contourner. Il a présenté ce lundi au même endroit une exposition sur les “Métiers d’arts et traditions populaires” avec 10 santonniers d’Auvergne-Rhône-Alpes, dans le but de promouvoir une tradition pourtant pas si locale.

“Les cochons sont adorables”

“Le santon, c’est surtout en Provence.” Invité à l’hôtel de région pour présenter ses réalisations à la presse, le santonnier drômois Damien Bellon a bien du mal à justifier la décision de Laurent Wauquiez. Et s’avoue incapable de citer un autre artisan santonnier, malgré la présence du Ligérien Adrien Tidjarian, également invité par la Région. L’artisan n’en dira pas plus. Pourtant, Laurent Wauquiez n’en démord pas. Face aux caméras, il défend le territoire, riche de ses “quarante santonniers, sur les cent cinquante en France”. Avocat du patrimoine culturel, le président du conseil régional entend “valoriser un métier d’art, un savoir-faire ancien”. Visiblement grand amateur de santons, il confie aux deux artisans quel “grand honneur” c’est pour lui de les rencontrer, et ne peut retenir son admiration devant certaines réalisations. “Les vaches sont magnifiques ! C’est rare dans une crèche” et “les cochons sont adorables”, s’exclame-t-il. Face aux caméras, Laurent Wauquiez annonce respecter la justice et le droit français, donc la décision du Conseil d’État. En lieu et place de crèche chrétienne, le hall de l’hôtel de région accueille cette année une “exposition des arts et traditions” locaux.

Scènes de vie

Les réalisations exposées surprennent par les situations qu’elles illustrent. Traditionnellement utilisés dans la composition des crèches chrétiennes de Noël, les santons de l’hôtel de région représentent surtout des situations quotidiennes de l’époque. Bergers et paysans vaquent à leurs tâches et les scènes religieuses se font rares. Au total, sur les 10 artisans exposés, on ne compte que 5 pièces représentant l’enfant Jésus, 3 représentations d’anges et seulement 2 des Rois mages. De là à y voir une manifestation concrète du discours de Laurent Wauquiez, arguant que les santons sont d’abord des œuvres d’art représentant des “scènes de vie” et non pas des œuvres religieuses, il n’y a qu’un pas. Pourtant, plusieurs des exposants se définissent eux-mêmes comme des artisans “créchistes”. Une dimension absente de leur travail à l’hôtel de région, tout comme leur revendication de travailler selon la “tradition provençale”.

Des artisans de tradition “provençale”

Le santon est-il vraiment une tradition d’Auvergne-Rhône-Alpes ? Laurent Wauquiez argue d’une tradition locale, ancrée dans toute la région. Plus de la moitié des exposants se réclament pourtant sur leurs sites Internet d’un artisanat de “tradition provençale”. La démarche surprend moins de la part de Renaud Muselier, le président LR de la région PACA, fervent soutien de Laurent Wauquiez à la présidence du parti Les Républicains. Le 3 décembre, il annonçait la mise en place d’une crèche dans son hôtel de région. La volonté est similaire : défendre les “traditions” et l’“identité” des santonniers de Provence. C’est la première fois que la région PACA met en place une telle exposition, qui a été saluée par les élus Front national locaux.

Laurent Wauquiez semble donc bien déterminé à contourner l’interdiction du Conseil d’État, quitte à remodeler à sa guise une forme d’artisanat traditionnel. Une obstination qui rappelle celle du maire de Béziers, Robert Ménard, qui a très médiatiquement annoncé l’installation d’une crèche dans sa mairie ce lundi 4 décembre.

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