Loi Macron : les viticulteurs du Beaujolais vont continuer le combat

Le Conseil Constitutionnel a rejeté hier l’amendement qui proposait d'alléger la loi Evin de 1991, en distinguant publicité et information sur l'alcool. Un décision sur la forme, les sages ayant considéré qu'il s'agissait d’un "cavalier législatif", c'est-à-dire une disposition n'ayant rien à voir avec le projet de loi dans lequel elle est insérée.

Cet amendement était fortement soutenu par l'ensemble de la filière viticole nationale, notamment à travers Vin et Société, structure qui représente l'ensemble de la filière viticole française au niveau national et européen. Ce rejet porte un coup d'arrêt à leurs revendications, même s'ils restent confiants : "On reste mobilisés et confiants parce que sur le fond, le Conseil Constitutionnel n'a rien redit sur l’amendement, mais il l'a refusé sur un aspect purement technique", a déclaré Jean Bourjade, délégué général de l'Inter-Beaujolais. Interrogé par Lyon Capitale, M. Bourjade a "appelé le gouvernement et le président de la République à tenir leur engagement de clarifier la loi Evin."

Cet amendement n'était pas prévu à l'origine dans le projet de la Loi Macron. Il avait été introduit par le sénateur (Les Républicains) de Gironde, Gérard César. Un amendement sur lequel n'était pas revenue l'Assemblée nationale. Un choix qui avait provoqué l'ire de Marisol Touraine, la ministre de la Santé. Cette dernière dénonçait alors "un coup dur porté à la santé publique", regrettant que "la loi Macron serve à détricoter la loi Evin."

"Ce que nous demandons, c'est simplement une clarification de cette loi et non son assouplissement"

Interrogé sur le sujet, le délégué général de l'Inter-Beaujolais a affiché un tout autre point de vue : "On a toujours prôné l'éducation et l'information plutôt que l'interdiction. Nous sommes pratiquement la seule filière qui dit ‘attention ne consommez pas trop nos produits’. Nous sommes tous très respectueux de la loi Evin." Selon lui, l'amendement ne va provoquer que des changements minimes visant à clarifier un flou juridique : "Aujourd’hui, un contenu journalistique, culturel, artistique, peut être attaqué sur la base de la loi Evin. Il y a un flou législatif. L'interprétation de la loi Evin est devenue de plus en plus restrictive et peu claire pour nous, dans notre promotion. Nous ne sommes jamais sûrs d'être dans le cadre de la loi. Ce que nous demandons, c'est simplement une clarification de cette loi et non son assouplissement. Notamment concernant l'oenotourisme et d'autres voies de communication. Car l'oenotourisme reste un axe majeur de notre économie."

En effet deux articles de presse ont déjà été condamnés sur la base de la loi Evin*. Un chiffre qu'il convient de relativiser, quand chaque année depuis près de 25 ans, de très nombreux articles sur le vin sont publiés.

"Même s'il semble technique, cet amendement libérera de facto la possibilité de faire de la publicité en faveur de l'alcool, et ce quasiment sans limite"

Si les viticulteurs veulent clarifier cette incertitude juridique sans changer les règles, Claude Evin, le père de la loi qui porte son nom, s'est montré "très inquiet" dans les colonnes du journal Le Parisien. "Même s'il semble technique, cet amendement libérera de facto la possibilité de faire de la publicité en faveur de l'alcool, et ce quasiment sans limite. On pourra faire n'importe quoi en matière de pub. Ce sera la fin de la loi Evin, adoptée voilà vingt-cinq ans", avait-il déclaré le 7 juin dernier dans le journal. Ayant été refusées sur un plan purement technique, les mesures de cet amendement pourront refaire surface dans un autre texte, ce que nous a confirmé Jean Bourjade : "le dialogue sur ce sujet va reprendre. On va voir dans les semaines et les mois à venir comment on peut faire pour réintroduire ce dispositif".

*(Décision TGI Paris, 20.12.2007 – Le Parisien ; Décision TGI Paris 21.03.2013 – Paris Match)
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