"C’est trop facile d’ouvrir un salon de tatouage aujourd’hui"

À l’occasion de la Tattoo Convention organisée à Lyon ce week-end, de nombreux professionnels confient leur inquiétude quant à l’explosion du nombre de salons et au manque de formation des jeunes tatoueurs.

Le grésillement des dermographes chatouille l’oreille avant même de passer les contrôles de sécurité. Le temps de se faire poser un bracelet d’entrée et déjà les visiteurs investissent les allées de la Tattoo Convention qui s’est tenue ce week-end, à Villeurbanne. En tout, ce sont 180 tatoueurs qui se sont réunis au Double Mixte. Un chiffre qui rappelle l’explosion des ouvertures de salons de tatouage un peu partout en France. "C’est trop facile d’ouvrir un salon maintenant. Il suffit de faire une formation en hygiène de 21 heures auprès d’un organisme reconnu et d’acheter son matériel pour pouvoir tatouer", confie Jerry, l’un des organisateurs de la Tattoo Convention. Pour lui, le nombre grandissant de salons de tatouage est aussi favorisé par une majorité de clients recherchant avant tout à "avoir un bon prix". Un Lyonnais rencontré sur le salon nuance : "J’ai connu des ratés avec un tatouage alors maintenant ce n’est plus le prix qui détermine l’action. Je suis prêt à mettre jusqu’à 1 000 euros."

"Être tatoueur, c’est un travail non stop 7 jours sur 7"

Toutefois, ne s’improvise pas tatoueur qui veut. "Aujourd’hui il y a pas mal de jeunes qui ouvrent des salons sans savoir vraiment tatouer et cela casse notre métier. Ils copient des dessins mais ne font pas de vraies créations", dénonce-t-on sur le stand du shop John Tattoo, basé dans l’Ain. Un tatouage mal réalisé a pourtant de grandes chances de mal vieillir et de mal supporter l’effet du soleil sur la peau. Pour un dessin avec de petits détails, un tatouage trop petit ne permet pas par ailleurs de travailler les niveaux de gris. D’où l’intérêt d’apprendre les bases du tatouage auprès de professionnels expérimentés. Selon le Syndicat national des artistes tatoueurs, il n’existe en effet pas de véritable formation ou d’école reconnue et certifiant les compétences du formateur. "C’est difficile de trouver un apprentissage mais il faut vraiment passer la porte des tatoueurs et participer à des séminaires qui durent souvent une semaine", insiste-t-on sur le stand.

Avis aux débutants : il vaut mieux s’essayer à l’encrage sur des peaux synthétiques, vendues au format A4 ou sur des modèles de mains, avant de chercher un maître d’apprentissage. Et surtout dessiner sans relâche. "Être tatoueur, c’est un travail non stop 7 jours sur 7, il faut vraiment être passionné. Les gens croient qu’on n’a rien à faire en rentrant à la maison le soir mais un tatouage, ça demande beaucoup de temps de préparation en amont, pour le dessin", soutient un tatoueur autodidacte, préférant rester anonyme. Pour lui, la formation à l’hygiène est essentielle pour connaître les risques d’infection mais aussi apprendre à respecter quelques règles de base : bien nettoyer son plan de travail, réceptionner le matériel, vérifier la périssabilité de l’encre ou encore évacuer et faire collecter les produits contaminés. "Un tatouage, c’est irréversible et il y a un enjeu de santé. Il faut impérativement un lieu aseptisé et des outils désinfectés. Il y a des règles à respecter."

Du matériel réservé aux professionnels

Une fois la formation à l’hygiène et l’apprentissage achevés, les tatoueurs en herbe doivent dégoter leurs propres outils. Pour éviter que des particuliers n’achètent des dermographes et de l’encre trop facilement, les vendeurs de matériel professionnel n’ouvrent leur porte qu’aux tatoueurs détenteurs d’un numéro SIRET, seul moyen d’identifier des professionnels installés. "Bien sûr ça n’empêche pas de tomber sur de mauvais tatoueurs peu expérimentés", lâche-t-on du bout des lèvres dans l’enceinte réservée aux professionnels sur la Tatto Convention.

Pour s’installer, il faut tout de même débourser entre 5 000 et 10 000 euros, le prix d’une machine oscillant entre 400 et 1 000 euros. Une différence de chiffres qui s’explique par les potentialités des appareils dont le nombre de tours par minute varie de l’un à l’autre. Le prix du reste du matériel reste secret, "même pour la vente en ligne, justement pour que les particuliers ne puissent pas en acheter".

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